Post Scriptum 2019 : ateliers pour en parler, ressentir, créer, écouter, renforcer la résilience : durée entre 3h à 3 jours selon le choix des organisateurs. La thématique peut être orientée vers notre rapport à la monnaie et à l’argent, à l’alimentation, ou rester générale.
Ceci est un modeste article de vulgarisation (un de plus !) pour présenter une magnifique invention en lien avec les articles précédents et proposer des relais vers d’autres sites : internet regorge déjà de propos et films très pertinents concernant la « june » (symbole : Ğ1). Par exemple notre site mayennais (et ornais). Merci d’avance pour vos commentaires.
Dans l’article d’avril, il était question de résilience : diminuer notre dépendance donc notre vulnérabilité, et inversement. La Ğ1 y était évoquée. Dans celui de mai, des sains mets… de plus en plus accessibles en Ğ1 !
Début 2019 : en Mayenne avec la Ğcoop commence à développer les circuits courts en monnaie libre !
S’autonomiser et se libérer du système occidental de croissance infinie, voué à l’échec (voire à la catastrophe) dans notre monde fini
De nombreux collectifs en tout genre se sont lancés dans la mise en pratique de l’autonomie dans un nombre croissant de domaines de la vie quotidienne.
La liberté semble de plus en plus limitée dans notre société dite libérale (et le néolibéralisme est encore pire).
En matière d’autonomie et de liberté, la banque et la monnaie restent souvent des bastions immuables, imprenables : de vrais bunkers !
Les monnaies locales complémentaires (MLC) sont une formidable avancée, notamment pour la prise de conscience qu’il n’y a pas plus de monnaie unique qu’il ne devrait y avoir de pensée unique. Le film documentaire « Demain » fait la part belle au mouvement international des Villes & Territoires en Transition (qui a beaucoup promu les MLC) et à son humble fondateur plein d’humour, Rob Hopkins. Le billet de 21 £ (livres locales de Totnes, « Totnes Pound »), ça vous rappelle quelque chose ?
Pourtant, ces monnaies locales complémentaires (connectées en mouvement national et international sans hiérarchie) sont adossées à l’euro, donc tributaires de la monnaie officielle, vulnérable et objet de prédation de spéculateurs sans scrupules (la majeure partie d’entre eux sont de surcroit des robots !). De plus il faut posséder des € pour acquérir ces monnaies. Alors comment s’en sortir ?
Le Collectif Monnaie Mayenne né en 2012 était issu de Mayenne en Transition et d’AgitaSEL. Il portait ce rêve de MLC avec son corollaire, les circuits courts.
Il a évolué vers la monnaie libre en 2015, avec le projet du Sou, et nous avons baptisé de ce nom l’association qui promeut la Ğ1 (et les échanges) en Mayenne et dans l’ouest de l’Orne.
Bonne nouvelle : une alternative sérieuse est opérationnelle
Des petits malins ont trouvé une brèche étonnante et détonante… et s’y engouffrent de plus en plus nombreux. Ils se reconnaissent dans le vaste mouvement des « communs » (souvent appelés « biens communs » ce qui est restrictif). La politologue Elinor Ostrom est la grande théoricienne des communs : très inspirante, elle a obtenu de nombreuses reconnaissances officielles, et même le Nobel d’économie en 2009 (c’était la première fois qu’il était décerné à une femme).
Ces pionniers ont développé un système de monnaie qui est aussi un mini revenu de base. Ce système s’appuie sur la Théorie Relative de la Monnaie patiemment élaborée et décrite par Stéphane Laborde, mathématicien perplexe devant le creusement des inégalités économiques.
Cette alternative est généreuse et porteuse d’équité !
Et inversement : le souci d’équité a donné naissance au principe de co-création monétaire.
Ainsi chaque membre co-crée la monnaie, et la perçoit aussitôt, le montant étant exactement le même pour tous. On retrouve ici le principe du revenu de base ou revenu universel, dont il existe moult théories et variantes. J’aime l’appeler revenu inconditionnel… d’existence digne, et je recommande vivement l’ouvrage qu’Abdennour Bidar lui a consacré en 2018 : Libérons-nous ! Des chaînes du travail et de la consommation. aux éditions « Les liens qui libèrent » (10 € au format poche).
Article 22 de la Déclaration Universelle des Droits Humains (1948)
Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale ; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l’effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l’organisation et des ressources de chaque pays.
Concrètement, en mars 2019, après 2 ans de fonctionnement « en vrai » (faisant suite à des années de recherche, développement et tests par une « communauté » de plus en plus vaste), la première « monnaie libre » au monde, appelée Ğ1 (« june »), compte 1700 membres co-créateurs de monnaie, qui tous perçoivent leur « dividende universel » quotidien. Il leur a fallu pour cela être acceptés dans la « Toile de Confiance » grâce à la certification (cooptation avec garantie) de 5 membres. Ils échangent de plus en plus de biens et services, à distance ou sur place, avec ces Ğ1 tombées du ciel ! (Le nombre de membres en temps réel est visible).
Magique ? Incroyable ? Enigmatique ? Suspect ? Quelques vidéos et articles vous montreront que c’est simple et complexe à la fois. Simple comme un aboutissement parfois laborieux, évident comme l’arrivée à un sommet après une ascension semée de difficultés.
La cerise sur le gâteau, c’est que toutes les projections dans le temps montrent que la monnaie libre tend à réduire les inégalités. En effet, le souci d’équité de son fondateur concerne non seulement la dimension spatiale — l’accès à la monnaie à un moment donné — : elle s’applique aussi dans le temps, entre les générations qui coexistent à ce moment donné et avec celles qui viendront ensuite.
Liberté, égalité, fraternité… et créativité !
« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. » C’est l’Article Premier de la DUDH.
Les événements organisés entre libres monnayeurs sont remarquablement fraternels. Organisation légère, autogestion et entraide spontanées pour le reste, grande sérénité… Qu’il s’agisse des Rencontres des Monnaies Libres (4 journées voire davantage, deux fois par an depuis 6 ans), ou d’autres rencontres, comme celles du premier anniversaire de Madame Ğ1 à Mayenne ou Toulouse.
De plus, le foisonnement créatif est époustouflant… La monnaie libre libère l’imagination et la générosité ! D’un point de vue psychologique, elle soigne notre petit moi blessé par la peur de manquer (combien de fois avons-nous entendu dès notre tendre enfance « c’est trop cher », « on n’a pas les moyens », et autres petites phrases qui nous ont conditionnés à notre insu et pour longtemps ?).
- une ébauche de ce que la monnaie libre pourrait faciliter dans le vivre ensemble à tout âge… (dernier quart de l’article).
- Un atelier (ImaJune mai 2018) (puis à Bordeaux en novembre, filmé) pour aider les utilisateurs à exprimer le potentiel qu’ils entrevoient et à extrapoler dans le sens de leur aspirations (d’autres ateliers suivront, à la demande de groupes locaux et lors d’autres événements)
La créativité concerne aussi les alternatives non numériques pour permettre à toute personne d’utiliser la monnaie libre même sans ordinateur ni téléphone « intelligent ». Livrets d’échanges, billets éphémères, cartes de paiement… La recherche et l’expérimentation vont bon train. Au Sou nous avons toujours tenu à n’exclure personne (a fortiori pas les « exclus »).
« Rien n’est plus puissant qu’une idée dont le temps est venu«
Variante parmi d’autres : « Rien n’arrête une idée dont le temps est venu. » En cherchant (en vain) la source de cette citation attribuée à Victor Hugo, parce que la monnaie libre m’évoque vraiment ça, j’ai lu que le bitcoin était une telle idée dont le temps est venu… Parlons-en brièvement pour dissiper des malentendus.
- Bitcoin et Ğ1 ont en commun d’être des crypto-monnaies numériques utilisant la technologie « Blockchain » (chaîne de blocs informatiques, en réseau, donc décentralisés) pour sécuriser les transactions, mais de façons diamétralement opposées sur les plans éthique et énergético-climatique !
- Le Bitcoin est vorace en énergie donc grand émetteur de gaz à effet de serre, alors que le système de la Ğ1 est très économe, pour des raisons d’écologie et de résilience (en cas d’effondrement majeur incluant internet, il serait possible de jalonner un territoire de petites antennes-relais pour les usages essentiels, dont la monnaie libre, très peu gourmande en « bande passante »).
- Le Bitcoin favorise la spéculation, l’accumulation, la concurrence… en revanche la Ğ1 stimule la coopération et la solidarité. Ce n’est pas un hasard si son nom est féminin.
- Enfin… le Bitcoin est très opaque, depuis sa création mystérieuse. La Ğ1 est d’une transparence absolue, jusqu’aux transactions et à leur libellé.
Quand bien même nous n’aurions plus aucun réseau informatique actif, nos échanges ne seraient pas paralysés par la panne des banques et du système monétaire non libre (comme c’est hélas arrivé très souvent en cas de crise économique majeure). Nous savons, pour l’avoir expérimenté depuis longtemps dans les SEL (systèmes d’échanges locaux), que nous pouvons créer notre propre monnaie. Nous avons la preuve aujourd’hui qu’à l’échelle d’un quartier, d’un village ou davantage, nous pouvons même créer notre monnaie-revenu !
Et les sains mets de mai ?
Autre bonne nouvelle : avec l’augmentation du nombre de membres et les échanges qui décollent, de plus en plus de biens et services sont proposés en monnaie libre, dont des denrées alimentaires (confitures, sirops, légumes, fruits, plats préparés, bière artisanale, etc.), des semences, des plants… Il est même question de diagnostics de la demande potentielle local pour faciliter la création d’activités ayant pour débouché (principal, unique ou secondaire) les libres monnayeurs, aussi appelés « junistes ».
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